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Alexandre A., conseiller développement territorial, CCI Versailles Val d’Oise Yvelines

« La géographie m'a permis de m'intéresser aux relations de l'homme avec son espace, aux manières qu'il a de l'aménager, de le développer, de le transformer et de le modeler à son image, en fonction de sa culture, de son histoire et de la manière qu'il a de se représenter le monde. Plus trivialement, la géographie m'a donné l'opportunité et le goût de voyager et de m'ouvrir au monde et aux autres ! Et j'ai très vite appliqué cette idée, en obtenant une bourse ERASMUS pour réaliser une Licence à Séville. En Andalousie, au-delà de la poursuite de mon cursus universitaire et de l'apprentissage d'une langue étrangère, j'ai découvert, inscrits dans la ville, les témoignages vivants de nombreux siècles d'influences croisées, issus du mélange de cultures différentes. J'ai voulu en savoir plus, ce qui m'a entraîné jusqu'au Maroc et à Fès en particulier. Là, en engageant un travail de doctorat concernant les enjeux et les stratégies liés à la réhabilitation de la médina, je me confronté aux jeux d'acteurs, au développement local, aux emboîtements d'échelle et à la formidable complexité de développer une réflexion permettant l'intervention sur la ville. J'ai aussi compris que, pour moi, la recherche en géographie se devait d'avoir ce caractère opérationnel, cette traduction concrète et visible que d'autres disciplines ne permettent pas aussi facilement, et que cela m'intéressait peut-être plus que la transmission du savoir. Par manque de confiance en moi (la peur de ne pas être à la hauteur d'un travail de recherche requérant rigueur et précision), ou par excès d'orgueil (la peur de l'échec et du jugement de « ses pairs »), j'ai compris à ce moment-là que le doctorat ne me correspondait peut-être pas. Dès lors, j'ai cherché à être plus opérationnel, plus concret, et l'occasion m'a été donnée « d'accompagner la recherche » dans le cadre d'un programme de recherche européen porté par le laboratoire de recherche URBAMA (Urbanisation du Monde Arabe*) et l'Université de Tours. En apprenant les techniques de gestion de projet, en me pliant aux règlements européens et aux règles de la comptabilité publique, je me suis détourné de la géographie durant quelques années, pour mieux y revenir aujourd'hui. Aujourd'hui conseiller en développement territorial à la Chambre de Commerce et d'Industrie de Versailles Val d'Oise Yvelines (CCIV), je renoue avec ma formation initiale de géographe, puisque le territoire de l'est du Val d'Oise, mon territoire d'intervention, pourrait être un formidable sujet de thèse ! La problématique des espaces périphériques en cours de mutation, vivant depuis une vingtaine d'année le passage d'une économie industrielle à une économie tertiaire et entraînant de graves difficultés au niveau des bassins d'emploi, se pose aujourd'hui de manière cruciale. Cette problématique se couple avec celles des banlieues, puisque ce territoire est traversé par de nombreuses zones urbaines sensibles qui cumulent plusieurs problèmes (faible niveau de qualification des habitants, difficulté d'accès aux bassins d'emplois que sont l'aéroport de Roissy ou la ville nouvelle de Cergy-Pontoise, problèmes d'accessibilité en transport en commun, etc.). Cet espace, au centre de formidables enjeux, bénéficie par ailleurs réserves foncières encore importantes, qui sont l'objet de nombreux projets de développement économique locaux. Je suis principalement chargé, sur ce territoire, de garantir la présence de la Chambre de Commerce auprès des collectivités territoriales et des principaux acteurs lié à l'insertion des populations afin de participer à l'émergence de projets de développement économique locaux en partenariat. Je retrouve ainsi mes réflexes de géographe notamment sur l'identification des enjeux, des jeux d'acteurs et des jeux d'échelles sur un territoire donné avec, comme thématique, le développement économique « durable » des territoires. Cet emploi fait en quelque sorte la « synthèse » d'un parcours universitaire et d'une expérience de gestion de projet européen et cela me plaît car contrairement à la neutralité requise pour un travail de recherche, on me demande de prendre position et d'être acteur moi-même ».

* Aujourd'hui Equipe de recherche sur le Monde Arabe et Méditerranéen, au sein du laboratoire du CNRS, CITERES)
  • Dates
    Créé le 19 mai 2009